AVIS N° 011/09/ARMP/CRD DU 27 OCTOBRE 2009
AVIS N° 011/09/ARMP/CRD DU 27 OCTOBRE 2009 DU COMITE DE REGLEMENT DES DIFFERENDS STATUANT EN COMMISSION LITIGES SUR LA SAISINE DU MAIRE DE RUFISQUE RELATIVE A LA CONFORMITE DES PROCEDURES DE PASSATION ET D’EXECUTION DU MARCHE PORTANT SUR L’ETUDE DE FAISABILITE POUR L’IMPLANTATION D’UNE UNITE DE TRAITEMENT D’ORDURES MENAGERES DANS LA COMMUNE
LE COMITE DE REGLEMENT DES DIFFERENDS STATUANT EN COMMISSION LITIGES :
Vu le Code des Obligations de l’Administration modifié par la loi n° 2006-16 du 30 juin 2006 ;
Vu le décret n° 2007-545 du 25 avril 2007 portant C ode des Marchés publics ;
Vu le décret N° 2007-546 du 25 avril 2007 portant o rganisation et fonctionnement de l'Autorité de Régulation des Marchés publics (ARMP) ;
Vu la décision n° 0005/ARMP/CRMP portant règlement intérieur du Conseil de Régulation des Marchés publics ;
Vu la lettre n° 851/VR/SG/SP/rb en date du 5 août 2 009 de la Mairie de Rufisque ;
Après avoir entendu le rapport de Monsieur Cheikh Saad Bou SAMBE, Directeur de la Réglementation et des Affaires juridiques, présentant les moyens et les conclusions du demandeur ;
En présence de Monsieur Mansour DIOP Président, de MM. Abd’El Kader NDIAYE, Birahime SECK et Mamadou DEME, membres du Comité de Règlement des Différends (CRD) ;
De MM. Youssouf SAKHO, Directeur général de l’ARMP, Cheikh Saad Bou SAMBE, Directeur de la Réglementation et des Affaires Juridiques et Omar SARR, Conseiller juridique, observateurs ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Adopte la présente délibération fondée sur la régularité du recours, les faits et moyens exposés ci-après :
Par lettre n° 851/VR/SG/SP/rb en date du 5 août 200 9 enregistrée le 6 août 2009 sous le numéro 493/09 bis au Secrétariat du CRD, le Maire de Rufisque a saisi le CRD d’une demande d’avis sur la conformité des procédures de passation et d’exécution du marché relatif à l’étude de faisabilité pour l’implantation d’une unité de traitement d’ordures ménagères dans la commune, signé par son prédécesseur.
LES FAITS
Dans le cadre de l’exécution du marché signé le 3 juillet 2008 et relatif à l’étude de faisabilité pour l’implantation d’une unité de traitement d’ordures ménagères dans la commune de Rufisque, le Cabinet Omnipay Africa SA a introduit auprès de l’autorité contractante par lettre en date du 11 juin 2009, une demande de règlement du reliquat de ses honoraires ;
En réponse, le nouveau Maire de la Commune de Rufisque s’est opposé au paiement du reliquat du marché au motif que les dispositions du décret 2007-545 du 25 avril 2007 portant Code des Marchés publics n’ont pas été respectées.
MOYENS INVOQUES PAR LE REQUERANT
L’Autorité contractante a donné une fin de non recevoir à la demande de paiement du requérant au motif que ledit marché ainsi que ses deux avenants en date du 3 juillet 2008 et du 7 octobre 2008 n’ont pas été app rouvés par les autorités habilitées à cet effet, en violation des dispositions de l’article 29 du Code des Marchés publics et de l’article 1 du décret n°96-1124 du 27 décembr e 1996 fixant le montant des marchés des collectivités locales soumis à approbation préalable du représentant de l’Etat ;
D’autre part, le Maire de la Ville de Rufisque soutient qu’en réponse à la demande d’autorisation de passer un marché par entente directe, la Direction centrale des Marchés publics (DCMP) a, dans sa lettre n° 108/ME F/DCMP/ en date du 2 juillet 2009, émis des observations qui n’ont pas été prises en compte par ses prédécesseurs.
Par ailleurs, malgré le paiement d’une première facture de quarante cinq millions (45 000 000) de francs CFA au titre de l’avance de démarrage, le Maire de la Commune estime que :
1. le projet sus visé aurait dû être initié par l’Entente CADAK-CAR qui assure la gestion des ordures ménagères au profit de l’ensemble des collectivités locales de la Région de Dakar ;
2. les prestations effectuées par le Cabinet Omnipay Africa SA ne sont pas en adéquation avec la complexité d’un projet de cette nature ;
3. les réserves foncières aptes à abriter ce type d’installation sont inexistantes dans le périmètre communal.
L’OBJET DE LA DEMANDE
La requête a pour objet de solliciter l’avis du CRD sur la décision d’annulation par les nouvelles autorités municipales d’un marché en cours d’exécution pour non respect des dispositions réglementaires en vigueur.
EXAMEN DE LA DEMANDE
Considérant que l’autorisation délivrée par lettre n° 108/MEF/DCMP du 2 juillet 2008 par la DCMP pour la conclusion d’un marché par entente directe entre la Commune de Rufisque et le Cabinet Omnipay Africa SA a été motivée sur la base d’une convention de partenariat entre la Ville de Rufisque et la société VMPRESS OVADIA ITALIA ;
Considérant qu’il ressort des dispositions de l’article 80 du Code des Marchés publics que l’avis de la DCMP sur la procédure de passation de la convention de délégation ou du contrat de partenariat est requis dans tous les cas sur la base du dossier d’appel à la concurrence ou d’un rapport d’opportunité établis par l’Autorité contractante ;
Qu’au regard des documents fournis, ledit contrat de partenariat portant sur la fourniture d’une installation d’extrusion pression de type VM 2035 a été signé le 25 avril 2008 par le Maire de la Ville de Rufisque et approuvé le 29 avril 2008 par le Président Directeur Général de la société VMPRESS OVADIA ITALIA, sans l’autorisation préalable de la DCMP, en violation des dispositions de l’article 76 alinéa 1 du Code des Marchés publics ;
Que ledit contrat n’ayant pas respecté les formalités substantielles requises, doit être frappé de nullité ;
Considérant que pour la mise en œuvre de la convention sus visée la Mairie de Rufisque a sollicité et obtenu l’autorisation de conclure un marché par entente directe avec le Cabinet Omnipay Africa SA, détenteur d’un contrat d’exclusivité avec la société VMPRESS OVADIA ITALIA, alors qu’il ne peut y avoir d’exclusivité pour des prestations portant sur des études de faisabilité ;
Que par ailleurs, nonobstant l’autorisation accordée par la DCMP de passer un marché par entente directe, il revenait par la suite à l’autorité contractante de soumettre à la DCMP le projet de contrat pour avis juridique et technique, et à l’autorité compétente, pour approbation formelle, le projet de contrat sous peine de sanction, conformément aux dispositions de l’article 138 a) et c) du Code des Marchés publics ;
Considérant que les dispositions du décret n°96-112 4 du 27 décembre 1996 fixant le montant des marchés des collectivités locales soumis à l’approbation préalable du représentant de l’Etat indiquent en ses articles premier et 2, que tout marché de fournitures, de services et de travaux d’un montant total égal ou supérieur à 50 millions des Villes de la Région de Dakar, communes chefs-lieux de région et communes dont le budget est égal ou supérieur à 300 millions, ne sont exécutoires qu’après avoir été approuvés par le représentant de l’Etat » ; que cette exigence est d’ailleurs rappelée par les dispositions de l’article 29.2 du Code des Marchés publics et de l’article 43 nouveau du Code des Obligations de l’Administration modifié par la loi n° 2006-16 du 30 juin 2006, qui assujettit la c onclusion du marché à son approbation par l’autorité compétente ;
Qu’à cet égard, le contrat portant sur l’étude de faisabilité du projet de construction d’une unité de traitement de déchets urbains signé par le Maire de la Ville de Rufisque et Omnipay Africa SA , ainsi que l’avenant n° 1 en date du 3 juillet 2008, et l’avenant n°2 du 7 octobre 2008, ont violé les même s formalités substantielles exigées en la matière, parce que n’ayant été soumis ni à la DCMP pour avis juridique et technique, ni au représentant de l’Etat pour approbation ;
Qu’en outre, l’avance de démarrage de quarante cinq (45) millions de francs consentie au titre de l’article 5 du contrat « dès enregistrement du contrat signé …», a été versée par la Commune de Rufisque sans caution et avant enregistrement, en violation des dispositions de l’article 91.3 du Code des Marchés publics qui exige à tout bénéficiaire d’une avance, la remise d’une garantie de restitution d’égal montant ;
Considérant également que l’avenant n°2 du 7 octobr e 2008 a supprimé l’obligation du cabinet Omnypay Africa de rechercher et d’obtenir le financement auprès de la Banque Ouest Africaine de Développement au profit de la Commune de Rufisque, et a conditionné le paiement de la dernière tranche du contrat au dépôt du rapport définitif ;
Considérant qu’aux termes de l’article 23 du Code des Marchés publics, un avenant ne peut avoir pour effet ou pour objet ni de substituer un autre marché au marché initial, ni en bouleverser l’économie ou en changer fondamentalement l’objet ;
Qu’il ne doit porter que sur :
1. la modification de clauses du marché initial n’ayant aucune incidence sur son montant, ni sur le volume des fournitures, services ou travaux, mais nécessaires à son exécution, y compris les changements affectant l’autorité contractante, la forme ou la structure juridique du titulaire sans remettre en cause les éléments du choix initial ni l’économie du marché, ni le titulaire ;
2. l’augmentation ou la réduction de la masse des fournitures, services ou
travaux excédant les variations maximales prévues par le dossier d’appel à la concurrence ;
3. la réalisation de fournitures, services ou travaux non prévus au marché, mais nécessaires à l’exécution de son objet du fait de la survenance de sujétions imprévues ;
4. la prolongation ou la réduction du délai d‘exécution du marché initial.
Qu’à ce titre, le fait de supprimer une clause substantielle du contrat, notamment celle portant sur la recherche et l’obtention du financement de l’infrastructure projetée, hypothèque sérieusement la réalisation du projet ;
EMET L’AVIS QUI SUIT :
1) Constate que le contrat de fourniture d’une installation d’une extrusion- pression entre la Ville de Rufisque et la société VMPRESS OVADIA ITALIA a été conclu le 25 avril 2008 sans l’autorisation préalable de la DCMP, en violation de l’article 76 alinéa 1 du Code des Marchés publics ;
2) Dit qu’il ne peut y avoir d’exclusivité pour des prestations portant sur des études de faisabilité ;
3) Constate que l’autorité contractante n’a pas soumis à la DCMP pour avis juridique et technique, le projet de contrat pour a pprobation formelle, en référence aux dispositions de l’article 138 a) et c) du Code des Marchés publics ;
4) Déclare que l’avance de démarrage de 50% consentie par la Commune de Rufisque a été versée au Cabinet Omnypay Africa SA sans contrepartie d’une garantie de restitution d’égal montant, en violation des dispositions de l’article 91.3 du Code des Marchés publics ;
5) Dit que la suppression de l’obligation substantielle incombant au Cabinet Omnipay Africa S.A. portant sur la recherche et l’obtention du financement du projet est de nature à hypothéquer sérieusement la réalisation de l’infrastructure ;
6) Dit que le contrat conclu entre la Ville de Rufisque et la société VMPRESS OVADIA ITALIA ainsi que le marché liant la Ville de Rufisque et le Cabinet Omnipay Africa SA, y compris ses avenants n° 1 et 2 n’ont pas respecté les formalités liées à leur approbation ; en conséquence, constate leur nullité ;
7) Dit que le DIrecteur général de l’ARMP est chargé de notifier à la Commune de Rufisque, au Cabinet Omnipay Africa SA ainsi qu’à la DCMP, le présent avis qui sera publié.
Le Président
Mansour DIOP